mardi 24 mai 2016

L'univers entre tes canines



Il suffit que j’aie
Un poème
Sur le bout de la langue
Pour que ma bouche
Devienne une galaxie

C’est tellement
Bon de mordre dedans
Jus d’étoile
Et pépins de nova
Que
Désolée
Désolée
Parfois
J’avale tout
Et ne vous laisse
Grosse impolie
Que trognon de poème

dimanche 22 mai 2016

Nuit liquide



Vincent Beaume


Notre lit est cette barque
Qui vogue sur les eaux
Du fleuve Amour
Vagues de coton
Flots de percale

Chaque nuit
Nous abordons
Des rivages nouveaux

Parfois
S’élève
Une petite tempête

Arrête de ronfler
Tu m’emmerdes

Puis un pied s’aventure
A bâbord
Qui s’amarre
A tribord
Et la navigation reprend
Tranquille

Vois-tu
Le canotage
Est une science
De la négociation
Des corps

Logique comme un arrosoir


Fraises
Radis
Myrtilles
Et un euro

Voilà ce qu'elle a planté
Ma gamine

Parce que
Si l'argent ne pousse jamais
C'est à cause des grands

Ces imbéciles
Le ramassent
Toujours avant



vendredi 20 mai 2016

L'amour Méditerranée

 

A la naissance
De la hanche
Il est un os
Comme une presqu'île
Pour plonger
Au-delà du jour
Là où la cuisse
Rencontre la cuisse
Fragile ressac
Qui donne
A nos amours
Ce goût de mer
Ce goût de nuit

Dernier rigodon avant la mort

Charles Blondin, premier funambule à franchir les chutes du Niagara. 1859.



Il paraît que les escargots
Peuvent ramper
Sans se couper
Le long d’une lame de rasoir

J’aimerais assez
L’heure venue
Avancer lentement
Sur les rebords coupants
De la nuit

Contempler d’un côté
La verte vallée
Des années vécues
Puis tendre mes antennes
De l’autre côté
Et toucher un peu
De l’insondable précipice

Je goûterais ainsi
Une dernière fois
La joie funambule
De l’enfant
Sur le muret
Qui défie le vide
Avant la chute

Kilo de plume kilo de plomb

Lucy Glendinning

Penchée sur ton berceau
Je te regarde
Assommée
Par la douceur
De tes quatre petits kilos

Et je voudrais être
Cette fourmi
Qui peut porter
Jusqu’à cinquante fois son poids

Mais je suis
Simplement ta mère
Le dos rompu
Dès le petit matin
Par tant de bonheur

Écrasée par une plume

La Statue de la Liberté a le cul en béton


Chéris
Le petit caillou
Au fond de ta chaussure
Il a quitté la route
Pour filer plus loin

Caresse
La poussière
Dans les airs
Qui déserte la terre
Pour le ciel

Ces anges noirs
Traîne-savates
Seront tes maîtres
Dans l'art minuscule
De la cavale

Elle devrait les écouter
La statue de la liberté
Qui soulèverait sa jupe
Pour sauter à pieds joints
Dans l'océan






jeudi 19 mai 2016

Force de frappe

Johann Fournier



Je rêve
D’un poème
Comme d’une bombe
Dont les lignes tendues
Seraient la mèche
Et toi
Le détonateur

La ménagerie sous ta langue


























Les mots sont
Des petits lions
Qui sautent
A travers
Le cerceau
De ta bouche

Oh
S'exclame la foule
Ah
Le joli numéro

Alors tu claques ta langue
De plus belle
Coup de fouet
Aux fesses
D'un adjectif 
Un peu trop mou

Mais prends garde
Mon ami
Un jour
Le plus docile
Te mordra
A la joue

Ce matin
J'en ai fait les frais
Décolleté
A sorti les crocs
De son échancrure

Demain
Ce sera peut-être
Polochon
Avec ses faux airs de coussinets

Méfie-toi de tous
Mon ami
Même les déterminants 
Ont des dents de lait
Et personne n'a jamais vu
Un chaton obéir