lundi 2 mars 2015

Enterrer les morts et réparer les vivants.


Décembre 2014, la petite fille passe une nuit blanche à lire Réparer les vivants. Elle se dit qu’elle aurait bien aimé écrire ce livre. 

Le 7 janvier 2015, dix sept personnes meurent assassinées lors des attentats de Charlie Hebdo. 

Les mots restent coincés dans la gorge de la gamine. 

Elle rejoint les millions d’hommes et de femmes qui marchent sans slogan. Elle sait cette rémission sans espoir, ce qui la rend encore plus belle et absurde à la fois. 

Pendant ce temps, le chaos caresse le silence pour mieux le poignarder dans le dos. Car déjà les mots s’animent dans les cœurs fébriles et, nourris à la mamelle des horreurs, se parent de reflets nouveaux, étrangement rouges, presque sales. Car, peu à peu, les bouches se sont ouvertes et des phrases affreuses en sont sorties comme de cratères. La contrition des uns a le goût des cendres, la clameur et le réquisitoire des autres celui du sang. 

Regardez-les, ces vilains mots qui s’affolent en flammèches, épées lancées contre boucliers, cuirasses blindées contre glaives acérés. Des glaives ou des glaires, la petite-fille ne sait plus trop car ce qui se crache dans les journaux, se déverse sur les écrans ou coule de la bouche de certains de ses amis est aussi dur que le fer et mou que la merde. 

La petite fille reste muette. 

Ses yeux rougissent à force de lire des articles, les commentaires sous ces articles, les statuts Facebook et les commentaires sous ces statuts, les statuts qui conseillent des articles et les articles conseillés par ces statuts sans parler des commentaires sous les articles conseillés par ces statuts… 
A force de s’amonceler, les mots ont formé des grappes confuses, s’agglomérant en amas disloqués, monceau de sens au rebut.

         -  Ding dong, bonjour monsieur le ferrailleur, y a du boulot pour vous !
     - Ah mais désolé ma petite dame, on ne se déplace plus dans ce merdier, les mots n’y valent plus rien.

Les mots ne valent plus rien ?…

De peur, les siens se sont tapis encore plus au fond de sa gorge.

Plus rien… D’ailleurs, elle n’écrit plus. Plus rien.

Mais qu'est-ce qu'elle compte!

Les likes (dites laïque)  puisque c’est devenu la compétition - tu m’aimes un peu, beaucoup, passionnément, à la folie ? - Non, pas du tout. Parce qu’on se déteste tous finalement. Finies les marches coude à coude, sans slogan, on lutte désormais à coup de formules assassines. Je te paternalise, te ridiculise, ferme mes écoutilles, t’accule, si encore on s’enculait ce serait plus gai mais non, les corps ne se touchent plus, on se fait la guerre derrière l’écran. 

La petite fille voudrait appeler au secours mais les mots sont coincés derrière ses amygdales, serrés les uns contre les autres, paralysés. 

Alors le cow-boy, prend les choses en main.

   - Allô, monsieur le plombier, c’est pour un problème de tuyauterie.

Il lui explique l’affaire mais l’autre lui répond qu’il est au regret, que là, mon bon monsieur, c’est pas de la robinetterie classique... si, on est spécialiste de père en fils dans la famille, les siphon-furet-ventouse, on a ça dans dans le sang et le sac aussi, mais non, on n’a jamais, au grand jamais, débouché une bonne-femme (ricanement salace au bout du fil) et puis d’abord, avant de vouloir dégager une canalisation, faudrait s’informer de la nature  du bouchon, il a pensé à ça le bon monsieur?

- Ça lui en bouche un coin au bonhomme hein ? 

Il a raccroché sans attendre la réaction du cow boy. Furieux, le gaucho s’est rué sur la première chose qui lui passait sous le nez, un livre sur une étagère en l’occurrence, pour le balancer, de rage, contre le mur. 

La petite fille ne like pas et s’empresse de le ramasser. Sur la couverture, elle reconnaît le visage. 

Platonov

Elle se souvient du livre de Maylis de Kerangal. Celui qu'elle aurait bien aimé écrire. Dont elle  aurait aimé trouver le titre. Une putain de bonne idée que cet emprunt à Tchekhov, lorsque Voïnistev demande à Triletski, au-dessus du cadavre de Platonov: 

- Que faire Nikolaï ?  
- Enterrer les morts et réparer les vivants.

Les infinitifs sonnent avec la simplicité d’une recette de cuisine. Tchekhov a dix huit ans quand il écrit cet échange mais son génie éclate en brandon de lumière: la réplique de Triletski est à la fois réponse et interrogation, vaste question qu'aucun mode d’emploi ni tutoriel Youtube ne pourra jamais résoudre, car il est bienheureux celui qui sait comment réparer les vivants. 

Après le 7 janvier, il aurait fallu les réparer ces vivants, mais comme on n’avait aucun mode d’emploi ni tutoriel Youtube, on les a laissé déconner avec leurs cht’ars dans la tête et leur circuits endommagés.

Pourtant, la phrase de Triletski a fait son chemin dans les circuits accidentés de la petite-fille. Elle a résonné lors des coups de téléphone à Vodka, des discussions avec SaintPolys qui, lui non plus, n’avait plus écrit depuis les attentats. 

Ou plutôt si, et c’est là que cela devient intéressant. Il avait retranscrit une interview vidéo de Denis Lavant datée du 04/07/2012, dans laquelle il avait « fai[t] disparaître le corps, la voix, et m[is] des points de suspension à la place, donc. »  

Cela paraît tout con mais ne l’est pas. 

Parce que se concentre, dans ces trois petits points, toute la question du corps et de l’écriture. Écrire c'est accepter de faire disparaître son corps. Cela pose des questions passionnantes en ce qui concerne la littérature, dans la mesure où l'écriture, en devenant poésie - peauésie-  a le pouvoir de redonner chair aux mots, de mieux incarner la voix de l'auteur en désincarnant son corps. 
Mais il n'en va pas de même sur les réseaux sociaux. Cette disparition du corps y devient problématique. Outre le fait que l’intime y est public, il n’y a plus aucune main sur l’épaule pour accompagner la vanne un peu vacharde, plus d’yeux qui s'excusent ou cillent de colère. Le corps disparaît avec tout ce qui excède les mots, les contredit même parfois (et c’est tant mieux). Or, c’est précisément la disparition de ce langage non verbal qui pose les bases d’un échange pour le moins dérangeant et déséquilibré. 

C’est dit : plutôt que cent likes, la petite-fille préfère qu’on lui dise Ta gueule en lui versant une rasade de vin. 

Alors, pour commencer à réparer les vivants, elle a voulu se souvenir que son corps était en vie. 

Acte I, elle a clôturé son compte Facebook.

Acte II, elle s’est payé des coups en terrasse, a invité des copains à manger, s’est engueulée avec eux, réconciliée autour d’un verre, filé son rhume au cow-boy qui n'a pu l'accompagner au théâtre, y est allée seule, a donné la place du cow-boy à une inconnue, donc assisté à Platonov à côté d'une femme qui respirait fort, a tout de même accepté le verre de vin offert par cette dernière à l'entracte, puis replongé au cœur de ces trois heures trente six de parole incarnée, bon dieu que ça fait du bien, merci Les Possédés, encore bu des coups à L'Entresort, pris le chemin du retour au beau milieu de la nuit et s'est retrouvée, stupeur, bloquée par un groupe de lapins qui restaient là,  autour du cadavre de l'un des leurs, vraisemblablement heurté par une voiture, alors la petite fille s'est garée au bord de la route, a attrapé la bête par les oreilles pour vaguement l'enterrer sous des feuilles mortes avant de faire fuir les autres vers la forêt. 
Curieuse nuit. 

- Que faire Nikolaï ?  
- Enterrer les morts et réparer les vivants.

Le travail était en cours.

Acte III, elle s’est remise à écrire, a repris son premier roman parce qu’il lui semblait qu'elle avait tourné autour de cette question du corps, cherché des mots juteux, des syntaxes vertébrales, posant les points et les virgules en poumon. C'est alors qu'elle s'est remerciée d'avoir coupé court aux mondanités germanopratines de facebook,  sacre de la formule et de l’ironie, et, loin de ces préciosités, elle s’est souvenu combien chaud pouvait être le lyrisme et vibratile l'épopée, l'une aussi douce que le creux d'un bras et l'autre aussi forte que la cuisse d'un guerrier. 

Acte IV. Elle a coupé du bois.

Acte V. Entre deux vrombissements de tronçonneuse, elle s’est demandé si la réponse à la question de Triletski n’était pas plus simple qu’elle ne se l'imaginait. 


- Que faire Nikolaï ?  
- Enterrer les morts et réparer les vivants.


N’était-ce pas tout bêtement avec de la vie que l’on pouvait réparer les vivants ? 

Par pitié, ne lui demandez pas ce que c’est que la vie, elle a passé son bac de philo depuis longtemps, même obtenu une licence, invitez-la plutôt à boire un allongé, les réponses se trouveront peut-être au fond de la tasse, dans les arabesques du marc de café, en tout cas, plus sûrement que sur cet écran.


Pour lire l'article de SaintPolys: http://saintspolysportraits.blogspot.fr/

Pour les autres aventures de la petite-fille et du cow-boy, c'est ici:




8 commentaires:

  1. Visiblement, les lecteurs non pourvus d'un compte google ne peuvent pas commenter les publications. Je rapporte donc le message reçu de la part de M.A Sorba qui, si elle ne partage pas mon positionnement quant aux réseaux sociaux, nourrit de manière constructive le débat (publié de manière fragmentée à cause des contraintes de nombre de signes impartis aux commentaires:


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  2. "J'ai lu ton blog pour comprendre les raisons de ton départ du monde de FB, je me doutais un peu de tes positions, mais je ne me doutais pas que ça avait un rapport immédiat avec le 7 janvier et je trouve que ton écriture donne beaucoup de sens à beaucoup de choses. C'est un beau texte (je ne peux pas le commenter en ligne parce que je n'ai pas de compte gmail... las ! l'hégémonie de Google nous oblige à utiliser le bon vieux mail pour se "parler" ;)

    Ca m'amène à une réflexion sur les conséquences que les attentats du 7 janvier ont eu sur les utilisateurs de l'écrit (lettrés ou moins lettrés) et, en général, sur ceux pour qui la liberté d'expression a un sens (ça fait quand même beaucoup de gens dans le pays, si on en croit les chiffres des manifs du 11 janvier...) Des conséquences inattendues et peut-être salutaires. Je ne dis pas que cet électrochoc va bouleverser du jour au lendemain toute la société, mais enfin, le débat sur la liberté d'expression a repris, chez nous qui, en France, au nom de la liberté d'expression, nous croyons permis de dire tout et n'importe quoi, au lieu de réfléchir à ce qu'on dit, comme si les mots n'avaient plus d'impact... Or, il était urgent de voir revenir ce débat, qui prouve, justement que nous l'exerçons, cette liberté-là, et que nous avons besoin aujourd'hui de comprendre mieux ses contours. Le débat sur les lois qui doivent régir les réseaux sociaux et l'internet est nécessaire depuis longtemps, il va de pair avec les mutations de la communication. Et pour nous autres, gens de plume, le temps est aussi venu de réévaluer le poids des mots, ainsi que les raisons et les besoins de l'écriture, ce qui fait qu'elle devient nécessaire à la vie des êtres humains.

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  3. Sur moi aussi, les attentats du 7 janvier ont eu un effet particulier. Passée en 48 heures par l'effroi, la stupeur, les sanglots, le désir de savoir, la crainte pour notre famille (qui vit dans une petite ville de la proche banlieue nord de Paris, très mixte, où l'on trouve de tout, y compris des femmes en burqa et des musulmans pratiquants vêtus à la mode djellaba-doudoune-baskets Adidas), le désir de vengeance et, finalement la conscience du risque d'une manipulation qui pourrait nous amener à nous déchirer au profit, toujours, des mêmes, je me suis refroidi la tête en me disant qu'il n'y avait pas d'autre solution que de nous battre contre l'ignorance crasse qui conduit à l'obscurantisme religieux. Passé donc ce choc émotionnel, dont je me suis retirée un peu malgré moi (j'avais bien envie de me joindre à la grande manif de Paris du 11 janvier, mais je n'avais pas la possibilité de faire garder mes enfants, bien petits, ce jour-là), et je me suis dit que, pour qu'un mec comme Cabu, figure de mon enfance, gentil grand frère et génial dessinateur qui ne ferait pas de mal à une mouche, ne soit pas mort pour rien, pour que ce monstrueux gâchis qui a broyé des intellectuels, des artistes, des policiers, pères et mères de famille, et, encore une fois, des Juifs, n'engendre pas la Bête immonde, alors, je me suis dit : "Voilà, maintenant, là, ça suffit, terminé de se la boucler".

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  4. La nouvelle m'est arrivée par Facebook, moins d'une heure après l'attentat à Charlie Hebdo, j'étais sur le point de quitter le bureau pour acheter un sandwich. J'ai immédiatement appelé Jean-Marc pour le prévenir. On savait qu'il y avait des morts mais on ne savait pas qui. Je me suis sentie blêmir mais je suis immédiatement sortie, j'avais envie de bouger, de parler. Dans la boulangerie, j'ai informé le boulanger - un Maghrébin arrivé en France dans les années 1990, je crois qu'il vient d'Algérie - de ce qui venait de se produire. Il avait l'air incrédule, comme s'il s'interrogeait sur la signification de cet événement, de mon besoin de le lui relater. Je lui ai dit, avec un hoquet : "c'est très grave, c'est un journal, on est en France, c'est ..." Il a vu la détresse dans mes yeux. Il m'a répondu que l'avant-veille, deux jeunes avaient posé une bombe au bureau de poste à 20 mètres de là : "Le Chinois du bureau de tabac au coin tout vu, tout entendu. Tous les murs ont vibré, dans le quartier." Je me suis souvenue que la veille, j'avais moi-même constaté que le bureau de poste avait ouvert plus tard qu'à l'ordinaire "pour incident grave". Ni une ni deux, j'ai payé mon sandwich et je me suis rendue chez les flics pour essayer d'en savoir plus.
    Sur le chemin du commissariat, je suis passée par la Police Municipale. J'entre, j'explique à l'agente à l'accueil, en essayant de paraître la plus détendue possible afin de ne pas passer pour une hystérique, qu'il y a eu un attentat à Charlie Hebdo et qu'il y a des morts. Elle n'est pas au courant. Je lui dit que je voulais savoir si c'était vrai, cette histoire de bombe à la Poste. Elle n'est pas au courant non plus. Bon... Je la laisse pour, comme elle me le suggère, aller voir la Police nationale. Là, il y a un planton - d'ordinaire il n'y en a pas - qui me confirme qu'il sont au courant pour Charlie Hebdo et que la bombe au bureau de Poste était en réalité une tentative d'attaque à main armée. Je me sens vaguement soulagée parce que l'attaque à main armée d'un bureau de Poste n'a rien à voir avec le jihadisme et que les flics ont l'air mobilisés. Je repasse par la Police municipale informer l'agente d'accueil qui s'est renseignée entre temps. Je repasse par la boulangerie pour rectifier l'info du boulanger. Vu le contexte, mieux vaut ne faut pas confondre une tentative d'attentat et une attaque à main armée. Dans quelques heures le pays sera au bord de la panique, rien ne sert d'ajouter de la confusion ou de la peur. Le boulanger a mis la radio pour s'informer après mon premier passage, il cherche des mots pour nommer sa stupeur. Je retourne au bureau. Je mets BFM TV et j'apprends le nom des morts. Je chiale en disant : "Putain, Wolinski, Charb, Cabu... Non ! Pas Cabu!"

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  5. Pendant les 48 heures qui suivent, je suis paralysée. Je ne peux plus ni écrire, ni travailler, ni rien du tout. Je n'ai plus qu'une seule obsession : la suite des événements, que je suis sur Internet. Les enfants, bien sûr, on ne doit rien leur dire, faire comme si de rien n'était, ils sont trop petits. J'indique quand même à la nounou, qui n'a pas eu l'info et qui est arrivée de Tunisie, elle "musulmane, mariée à un Italien de Tunisie" il y a 15 ans, que c'est très grave : "Cabu, c'était le héros de mon enfance, celui de toute notre génération, c'est terrible et puis c'est un journal, c'est pas possible, on est en France, on est un pays laïc, on est une démocratie, on ne peut pas tuer des journalistes, c'est toute notre histoire !" Elle regarde le JT du soir. Dès le lendemain matin, elle me dit, horrifiée : "l'Islam n'a rien à voir avec tout ça. Ce sont des sauvages, des assassins, des lâches. Ils salissent la religion, ils salissent Dieu." Elle est soulagée d'apprendre comme moi, sur Internet, le vendredi après-midi, la mort des frères Kouachi et d'Amédy Coulibaly : "Ils les ont attrapés", me souffle-t-elle en me passant la petite. Son fils, étudiant en médecine, ira défiler à la manif le dimanche suivant. Quelques jours plus tard, il fera part à sa mère de ses doutes... "Un coup monté ? Non", dit sa mère. "Et puis, regardez, c'est beau... " Elle s'est procuré le numéro suivant de Charlie Hebdo : "Regardez, le Prophète, il pleure... et il pardonne".

    Depuis le 7 janvier, j'éprouve un besoin de particulier de parler et d'écrire, parce que je sais que les mots peuvent soigner la société. J'ai perdu une part de rêve et d'enfance ce jour-là mais le chemin à suivre en pleine conscience ne m'est jamais apparu aussi clairement. Les terroristes s'en sont pris à l'enfant que j'étais. Ils s'en sont pris à mon identité culturelle et spirituelle. A mon désir et à ma capacité de pensée. Ils ignoraient la mémoire. Ils trafiquaient l'histoire. Ils voulaient nous priver de mots, de signes, de parole. Ils voulaient détruire l'avenir. De vrais fachos. C'est là que je me suis dit qu'il ne fallait pas que tous ces morts - mes morts, les nôtres - soient morts pour rien. Il fallait continuer à imprimer dans la société les valeurs que je partageais avec eux, comme eux le faisaient. Je ne me suis jamais sentie aussi libre de prendre la parole que depuis ce jour-là. Je me suis dit que les politiques depuis tant d'années, par arrivisme, veulerie, lâcheté ou populisme, avaient bien leur part de responsabilité. Mais surtout, les médias avaient bien mérité la critique, à cause de leur partialité fréquente, de leur manière consensuelle de relater, sélectionner et hiérarchiser l'information, de leur négligence le recoupement des sources, de la langue de bois, des lieux communs, des amalgames, des mensonges, des petits arrangements, des travestissements, de la mauvaise foi. Des trafics de mots en tout genre, qui, infusent, comme un poison lent dans la tête de nos concitoyens. Nous avons besoin, comme dit Edwy Plenel, d'un journalisme qui nous "élève". Les mots des médias peuvent aussi bien nous monter les uns contre les autres que nous pousser à nous unir. "Je suis Charlie", quel mot d'ordre simple et quel impact dans la caisse de résonance des réseaux sociaux !

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  6. Ce que les êtres humains disent ou écrivent a toujours un impact. Oui, les mots peuvent changer le monde. J'ai pris une bonne résolution pour 2015 qui doit devenir une habitude pour toute ma vie. Dire et écrire ce que je pense, chaque jour, avec dans le but de propager autour de moi la bienveillance et démonter la haine. Je veux traquer l'ignorance et la bêtise, avec le sourire, si possible, in memoriam. Je veux aiguiser le sens critique de mes contemporains. Je parle maintenant de l'Ukraine avec le boulanger et j'ai décidé de ne plus offrir que des livres aux anniversaires. J'ouvre Facebook le matin, et au cours ma journée de travail, je dialogue avec mes interlocuteurs - il y en a de toute sorte - et j'essaie, en 140 signes, de porter vivement le fer dans la plaie. "Liberté, j'écris ton nom", comme dit le poète, sur les réseaux sociaux, sur les blogs, à la télévision, dans mon travail, avec le boulanger, avec les enfants, avec des lecteurs, je choisis mes mots - je les connais bien - pour les utiliser à bon escient.
    Nous pouvons les utiliser pour combattre la bêtise humaine, que ce soit dans un tweet de 140 mots, ou dans une oeuvre de 140 pages. Nous n'avons jamais eu autant besoin de la culture.
    Tout ça pour te dire, ma chère Laurine, que si nous n'avons pas la même analyse, nous partageons la même conclusion. Nous avons été paralysées par la peur mais nous devons poursuivre notre travail de plume. Et tant mieux si tu abandonnes les 140 signes pour te consacrer à 140 pages... Ca demande quand même plus de concentration !"

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  7. Je viens de lire l'histoire de la petite fille aux mots noués dans la gorge.Ça m'a remuée. C'est bon de lire un texte où l'on sent les mouvements d'une pensée singulière derrière les mots. Ça soulage. Je comprends ta décision Laurine. Ecris ! Oui. Et contribue à ta manière à réparer des vivants :-)

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